SEMINAIRE "NOUVELLES APPROCHES PSYCHANALYTIQUES"  INSTITUT UNIVERSITAIRE RACHI

Lundi 15 janvier 2024

"L’ENFANT ET LA PSYCHANALYSE DANS LE MONDE D’AUJOURD’HUI."

Anne Delafosse-Bazin,

Psychanalyste

 

Pour faire le lien entre ce que la psychanalyse a découvert et parfois inventé de la connaissance des enfants et la question qui remue les adultes : comment éduque- t-on un enfant, j’ai serré mon propos autour de ce que certains psychanalystes ont théorisé sur la construction psychique de l’enfant. Je vais me référer à ceux qui ont le plus publié, et parfois créé une école de pensée, sans oublier qu’ils ont pris appui sur d’autres dont les travaux les ont inspirés. Ils ont parfois travaillé à trouver la façon de s’adresser aux parents, éducateurs à partir de leurs découvertes et les mettrai à l’épreuve de l’actualité. La psychanalyse ne doit jamais intervenir directement dans l’éducation de l’enfant mais aider les adultes responsables à faire avec l’enfant. Son discours est toujours un écart par rapport au discours dominant.

Comment s’occupe- t-on de nos enfants aujourd’hui, comment les faisons-nous grandir, comment prenons-nous soin d’eux ? Je proposerai quelques idées et questions parmi d’autres à partir de ce que la psychanalyse nous a appris et ne cesse de questionner dans l’actualité. Les découvertes de la psychanalyse sont toujours dynamiques parce qu’elles rencontrent toujours l’inconnu.

Comment aide-t-on aujourd’hui un enfant à grandir c’est-à-dire, traverser ses étapes de maturation, dans le respect de leur temporalité singulière, à partir de sa vie psychique primitive :

1 : A apaiser l’excitation pulsionnelle et l’angoisse qui lui est consubstantielle et la transformer en expérience enrichissante.

2 : A entrer en contact de façon vivante et créative avec cette réalité interne.

3 : A rencontrer la réalité extérieure ( ce qui est reconnu comme non-moi jusqu’à la vie sociale élargie), entre une illusion de toute-puissante sur cette réalité, et une soumission adaptative et normative à elle. On entend comment le verbe « entrer » parle d’espace interne, externe et d’espace entre. 

4 : A faire avec le désir inconscient des adultes, avec ce qu’ils lui veulent, pour trouver sa place de sujet incarné et parlant.

5 : A vivre peu à peu avec ses possibles aussi bien qu’avec l’impossible de la condition humaine.

En 1925, en préface du livre d’August Aichhorn, «  Jeunesse à l’abandon », Sigmund FREUD (1856-1939) écrit : « Il semble presque, cependant, que l’analyse soit le troisième de ces métiers « impossibles » dans lesquels on peut d’emblée être sûr d’un succès insuffisant. Les deux autres connus depuis longtemps sont éduquer et gouverner », citation qu’il reprendra en 1937 dans son texte testamentaire, «  Analyse avec fin et analyse sans fin. ». David Aichhorn est membre de la Société psychanalytique de Vienne, d’abord éducateur auprès de jeunes délinquants puis formé à la pédagogie curative dans un service hospitalier, il enseigne ensuite aux travailleurs sociaux et est à l’origine du courant de pédagogie psychanalytique. Il s’inspire beaucoup du travail de Freud.  Dirigeant des institutions pour jeunes délinquants issus de familles pauvres, il base toute l’éducation sur le souci de soi et d’autrui, une éducation qui travaille sur le différé de la jouissance immédiate, passe par la parole comme médiation cruciale pour le lien social, et par le transfert, ce qui fera l’objet d’une prochaine conférence sur les découvertes de la psychanalyse. Cela fait déjà beaucoup pour l’époque.

Ces trois métiers, gouverner, éduquer et faire de la psychanalyse sont des métiers impossibles parce qu’ils sont des métiers de l’impossible : ils ont en commun de buter sur des résistances, d’abord à vouloir que tout soit possible, résistance donc à l’impossible lui-même, impossible barrant l’accès à nos désirs tout-puissants demandant à être satisfaits et engendrant parfois des actes et passages à l’acte.

Trois métiers impossibles aussi parce que leur exercice passe par des institutions. L’Etat a ses instances politiques, l’école tous ses cadres de pratique, la psychanalyse ses écoles. Toutes posent les questions de filiation, transmission etc. La vie des institutions a ses propres résistances face aux changements et à l’entendement de la souffrance, la famille étant bien sûr la première pour l’enfant. Et cet enfant met les adultes face à leurs responsabilités quant au discours qui lui est tenu, avec ses nouveaux modes de transmission des signifiants injonctifs actuels, comme la toile numérique.

L’invention de la psychanalyse des enfants a en effet été le terrain de controverses très âpres, dans un contexte des années 1920,30,40 où les psychanalystes découvraient dans la relation avec leurs propres enfants, et ceux de leur entourage, il fallait bien commencer, des réalités nouvelles sur les origines et la constitution de la vie psychique.

FREUD n’a pas été un psychanalyste d’enfants, sauf et de façon indirecte le cas de l’analyse d’une phobie chez un petit garçon de 5 ans ( Le petit Hans), qu’il a traité en passant par le père à qui il a demandé d’appliquer le traitement. Il a fait ses découvertes à partir de l’observation de ses enfants et petits-enfants et de l’analyse de l’infantile refoulé et reconstruit dans les cures auprès de ses patients adultes, j’en donnerai un exemple. L’archaïque, les plus anciennes traces du fonctionnement psychique l’intéressaient, en correspondance avec les étapes primitives de la civilisation.

Une précaution d’usage : les concepts issus des découvertes freudiennes ne sont pas à prendre pour la réalité. Freud : « tout se passe comme s’il y avait un moi, un surmoi, un ça ». C’est la métapsychologie.

PREMIERE DECOUVERTE : L’EXISTENCE DE LA SEXUALITE CHEZ L’ENFANT

En 1905 : «  Trois essais sur la théorie de la sexualité » : la pulsion sexuelle généralement décrite comme s’éveillant à la puberté existe chez l’enfant dès sa naissance.

La réalité sexuelle infantile n’est pas d’emblée basée sur la différence des sexes féminin et masculin et la génitalité. Elle est d’abord polymorphe, faite de sources multiples de plaisirs partant du corps, et de ses zones partielles qui tendront à s’unifier à la puberté dont la source se centrera sur les organes génitaux. On parle du sexuel (catégorie que Jean LAPLANCHE nomme le sexual) qui n’a rien à voir avec le sexué à partir de la puberté. Le sexué du processus pubertaire est aussi le fait d’une réalité hormonale adaptative, déterminée génétiquement par un but préétabli, celui de la reproduction et de la survie de l’espèce, celui de la satisfaction. Chez l’enfant, il y a un silence hormonal dès sa naissance jusqu’à sa pré puberté, une absence totale de sexualité instinctuelle, et cette sexualité n’apporte pas une satisfaction mais une excitation. C’est dans ce creux dit Laplanche que la sexualité surgit dans son existence dès ses premiers jours de façon chaotique, anarchique, étant même anti-adaptative et devant être cadrée, endiguée.

L’enfant vit dès sa naissance dans un corps pulsionnel, traversé par des excitations érogènes, venant de sources multiples qu’il va essayer de reproduire, pour en éprouver du plaisir mais aussi l’apaisement par la décharge de la tension provoquée par ces sources : les muqueuses, la surface de la peau ,les sources mécaniques comme le balancement, la musculature, excitations auxquelles s’attacheront très vite les affects dans sa relation d’attachement à ses premiers autres. La pulsion sexuelle prend appui sur les besoins physiologiques. Par exemple le bébé qui tète satisfait son besoin de se nourrir et ressent en même temps une satisfaction de plaisir. Ce sein qui est au début source auto-érotique va peu à peu être reconnu comme objet appartenant à la mère comme personne totale qui deviendra objet d’amour.

Les émotions peuvent, dit Freud engendrer de curieux effets paradoxaux puisque l’épouvante, la peur d’un examen scolaire, une sensation douloureuse peuvent être accompagnées d’excitation sexuelle, et plus tard les fonctions intellectuelles, l’attention, la concentration par exemple. Freud dit qu’on n’en connait encore pas toujours les origines, comme l’excitation produite par la pulsion de voir, la pulsion de cruauté.

L’énergie psychique a donc une composante sexuelle que Freud appelle la libido qui circule par poussées, d’où le terme de pulsions qui prennent leur source dans une excitation corporelle et sont reliées en même temps au psychisme, c’est-à-dire liées aux fantasmes, au début de la vie très restreint mais qui se constituera en idées, fantasmes, images..

La force pulsionnelle génétique a une intensité variable d’un individu à un autre, mais est aussi pour un même individu, d’une intensité variable selon son âge, les périodes de sa vie..

Cela ajouté au fait que si l’humanité est en ce sens animale, c’est une animalité qui vient au monde inachevée, le premier épanouissement de la sexualité se faisant sur un moi inachevé et faible sur lequel « ces incitations décisives pour la vie sexuelle de la maturité agissent comme des traumatismes ». Il écrit : «  Devant l’enfant de la civilisation, on éprouve que l’édification de ces digues est l’œuvre de l’éducation, et il est certain que l’éducation y contribue largement. En réalité, cette évolution est organiquement déterminée, héréditairement fixée et peut à l’occasion s’effectuer sans le moindre recours à l’éducation. L’éducation reste entièrement dans le domaine qui lui a été assigné lorsqu’elle se borne à suivre les lignes tracées organiquement et à leur imprimer une forme plus nette et plus profonde ». Il faudra complexifier cet aspect phylogénétique avec l’expérience ontogénétique constituée dans la relation aux autres et à travers la dimension du fantasme.

Je veux faire entendre ici le mouvement d’accompagnement éducatif que Freud préconise (parents, éducateurs), accompagnement du développement de l’enfant et non empêchement, répression ou au contraire surexcitation. Mettre des digues face à l’effet traumatique de l’énergie pulsionnelle. Voir l’expression « la dérive des contenants » du psychiatre Corcos.

Bien plus tard, en 1933 « Nouvelles conférences d’introduction à la psychanalyse. Eclaircissements, applications, orientations », il préconise  « une application de la psychanalyse à la pédagogie, à l’éducation de la génération suivante », ce que sa fille Anna FREUD (1895-1982 va s’appliquer à faire, en suivant une formation à l’école Montessori et fonder une école à Vienne où se confronteront pédagogie et psychanalyse. Dans le courant de la pédagogie analytique créé par August Aichorn, elle soutient une action éducative du psychanalyste pour éduquer les pulsions de l’enfant, l’aider à ne pas aller à la satisfaction immédiate lorsqu’apparaissent les désirs à la levée du refoulement pendant la cure, renforcer le surmoi.. Se pose la question des frontières et indications entre l’analyste de la névrose infantile et de l’action éducative.

1933 « La difficulté de l’enfance consiste en ce que l’enfant doit s’approprier en un court laps de temps les résultats d’un développement de civilisation sur des dizaines de millénaires : la maîtrise pulsionnelle et l’adaptation sociale, du moins les premiers rudiments de l’une et l’autre ».

C’est toujours un conflit : « Il faut que l’éducation inhibe, interdise, réprime et elle y a d’ailleurs largement veillé en tout temps. Mais l’analyse nous a appris que c’est précisément cette répression des pulsions qui entraine une maladie névrotique. L’éducation doit donc chercher son chemin entre le Scylla du laisser-faire et le Charybde de la frustration… D’autre part il faut encore prendre en considération le fait que les objets de l’influence éducative apportent avec eux des dispositions constitutionnelles très différentes, de sorte qu’il est impossible que le même procédé éducatif soit également bon pour tous les enfants ». Deviner par de faibles indices ce qui se déroule dans la vie psychique inachevée de l’enfant est un point essentiel qui mène Freud à penser que les éducateurs aussi bien que les parents parviendraient mieux à cette tâche s’ils étaient analysés, s’ils avaient été sensibilisés à l’existence de la réalité psychique, et à la réalité sexuelle de la vie psychique.

DEUXIEME DECOUVERTE : L’EXISTENCE DU REFOULEMENT ET DE L’INCONSCIENT CHEZ L’ENFANT.

On différencie la sexualité de l’enfant de l’infantile qu’est le destin de la sexualité dans l’après-coup de son amnésie, l’amnésie infantile qui est le résultat du refoulement, acte psychique rendant les souvenirs de la prime enfance inaccessibles à la conscience. L’enfant qui grandit oublie ce qui a pu être douloureux, déplaisant, immoral dans ces impressions infantiles. La période de latence vers 7 ou 8 ans est le moment où les pulsions et leurs fantasmes s’apaisent, où le savoir scolaire permet cette mise à distance avant le rebond à l’adolescence. C’est à cette période dit Freud, que se constituent «  les forces psychiques qui, plus tard, feront obstacle aux pulsions sexuelles, limiteront et resserreront leurs cours (dégoût, pudeur, aspirations morales et esthétiques) ».

Dans un travail d’analyse, des souvenirs liés à cette sexualité de l’enfance font retour à la conscience sous une forme toujours reconstruite parce que la vie psychique s’est transformée depuis le temps de l’enfance et être analysables.

  • Au cours des premières années, Freud repère donc un moi faible et des « tempêtes d’affects » . Le terme affect désigne ce qui s’adjoint à la recherche d’une excitation et de sa satisfaction : il s’agit de liens d’attachement et d’amour tels que l’enfant les éprouve envers ses premiers proches, ses parents ou premières figures d’attachement, le complexe oedipien étant ce qui va constituer ses premières expériences d’amour, de haine, de culpabilité, face auxquelles l’enfant va se défendre par le refoulement. L’enfant passe ainsi de l’activité auto-érotique de ses pulsions et objets partiels, tels le sein, à l’amour de l’objet total, la mère.
  • Le refoulement « pierre d’angle sur quoi repose toute la psychanalyse » dit Freud en 1914. Il n’a pas inventé ce concept, il l’a théorisé, et je ne développerai pas ici, mais je voudrais en faire entendre les mouvements de la vie psychique chez l’enfant. Le refoulement met hors de la conscience. Il met quoi :non pas la pulsion ni les affects, mais les images, les pensées, les souvenirs qui y sont rattachés, c’est-à-dire ce qui est déjà passé par un début de transformation symbolique, une représentation de la pulsion ou de l’affect pour pouvoir s’inscrire dans la vie psychique. La dimension organique de la pulsion ne trouve pas d’inscription possible et c’est une véritable question pour la psychanalyse, celle de l’inanalysable, ce que Freud a appelé le roc du biologique. Ces images, pensées, souvenirs sont inconciliables avec une partie du moi qui essaie de préserver son intégrité et sa morale, face à des déceptions douloureuses, la menace de punition, des désirs contradictoires, des désirs interdits etc. Cette partie du moi censure et refoule dans une autre partie qui constitue l’inconscient. Ce qui fait retour de l’inconscient et franchit de nouveau l’état conscient, ce sont les actes manqués, les lapsus, les rêves, les symptômes notamment. Pourquoi ce retour du refoulé : parce que l’inconscient pousse pour s’exprimer et se libérer de la censure.

Un aspect du travail du psychanalyste est d’interpréter ce retour du refoulé obtenu par la levée du refoulement. Selon Freud, les mouvements de désir qui ont été refoulés pendant l’enfance restent indestructibles, intangibles et peuvent donc se reproduire dans la relation analytique par le transfert.

Exemples :

Je vais passer par deux textes illustratifs de Freud : « Deux mensonges d’enfants » en 1913 dans « Névrose, psychose et perversion » et « Une association d’idée d’une enfant de 4 ans » en 1920, dans « Résultats, idées, problèmes ».

  • Je commence par la deuxième illustration qui montre que tous ces mouvements s’organisent très tôt chez l’enfant. Dans « Résultats, idées, problèmes ». Il montre la façon dont l’inconscient peut accéder à la conscience de façon indirecte, comme presque toujours, et par association d’idées selon une chaine symbolique, un mot en symbolisant un autre. Lire le texte.

C’est le travail de la psychanalyse. La consigne est de dire tout ce qui vient en essayant le moins possible de retenir ce qui vient à la pensée. On entend ici le questionnement de cette enfant sur l’un des quatre fantasmes que Freud a découverts et décrits comme originaires, c’est-à-dire organisant la vie fantasmatique de façon universelle quelque- soit l’histoire singulière. Ici il s’agit de celui appelé le fantasme de la scène originaire qui renvoie à la sexualité des parents et à notre conception. Freud a découvert cinq fantasmes originaires (castration, retour au sein maternel, séduction, scène primitive et roman familial). Voir les théories sexuelles infantiles.

  • DEUX MENSONGES D’ENFANTS.

Celui dont je vais parler est une illustration du Complexe d’Œdipe, que Freud a découvert à partir du mythe d’Oedipe et à partir duquel il a inventé la psychanalyse. Et pour montrer comment fonctionne l’inconscient.

En introduction à ce texte, il écrit : « Il est naturel que les enfants mentent lorsque ce faisant ils imitent les mensonges des adultes. Mais un certain nombre de mensonges d’enfants bien élevés ont une signification particulière ; ils devraient faire réfléchir les éducateurs au lieu de les exaspérer. Ils se produisent sous l’influence de motifs amoureux d’une force extrême et deviennent néfastes lorsqu’ils provoquent un malentendu entre l’enfant et la personne qu’il aime ».

Voir le premier cas. Il ne s’agit pas ici d’un mensonge pathologique. Il y a d’autres formes de mensonges plus graves. La question de la souffrance pathologique chez l’enfant, d’autres psychanalystes vont y travailler et seront vraiment au chevet de la vie psychique de ces enfants.

C’est un souvenir qu’une patiente adulte raconte à Freud. A 7 ans, elle avait demandé de l’argent à son père pour acheter des couleurs afin de peindre un œuf de Pâques. Celui-ci avait refusé, disant qu’il n’avait pas d’argent.

Pour une autre occasion, elle obtient de l’argent de celui-ci, et garde la monnaie pour s’acheter secrètement ces couleurs. Le père soupçonneux la questionne, elle nie, son frère de deux plus âgé la dénonce. Elle est sévèrement punie par sa mère, qui se montre ensuite très ébranlée par le désespoir de sa fille. Elle l’emmène se promener mais cette patiente qualifiera elle-même cette expérience de « tournant » dans sa jeunesse. A partir de là, « l’enfant turbulente et pleine d’assurance est devenue timide et timorée ». S’ensuivent plusieurs situations dans sa vie de jeune fille et d’adulte dans lesquelles elle refuse de dépendre de quiconque financièrement.

Elle reconstruit ses souvenirs dans son travail analytique : lorsqu’elle avait trois et demi, elle avait une bonne d’enfant à laquelle elle était très attachée. Celle-ci avait une liaison avec le médecin, l’enfant avait sans doute assisté à des scènes sexuelles entre eux, on ne peut pas dire avec certitude, dit Freud qu’elle avait vu le médecin donner de l’argent à la jeune fille mais ce qui est sûr c’est que la jeune fille donnait à l’enfant quelques piécettes pour acheter son silence. Il se pouvait que le médecin ait donné de l’argent à la fillette. Cette enfant, jalouse, avait trahi sa bonne auprès de sa mère.

Pour la fillette donc, recevoir de l’argent de quelqu’un était associé avec le fait avoir une liaison amoureuse et donc, prendre de l’argent au père équivalait à une déclaration d’amour. Le puissant fantasme qui faisait de son père son amoureux et d’acquérir de lui ces couleurs l’avait emporté sur l’interdit. L’enfant ne pouvait avouer parce que le motif, inconscient, l’amour pour le père était coupable. De plus, le père lui refusant sa tendresse et la faisant punir par la mère lui « brisait l’âme ». Pendant l’analyse, elle tomba dans une profonde dépression à un moment où Freud lui demanda de ne plus lui apporter des fleurs, répétant ainsi le dédain du père. C’est ce qui permit d’accéder à ce souvenir. C’est là le mouvement de répétition par le transfert. L’amour oedipien pour l’un des parents et la rivalité envers l’autre se constituent dans le meilleur des cas en complexe, c’est-à-dire en un moment d’articulation, de structuration psychique qui pose l’interdit, différencie les générations et la différence des sexes. Pour une fille, vouloir prendre la place de la mère auprès du père se transforme en désir de ressembler plus tard à la mère en tant que femme, devenir une femme comme elle et désirer plus tard un homme autre que le père.

Je signale ici ce que ces exemples permettent de discerner la vie cérébrale, neurologique avec ses comportements afférents de la vie psychique qui n’est pas localisée dans le cerveau mais dans le corps tout entier, dans un corps affecté par sa relation aux autres, qui va être le lieu expérimental d’où l’enfant va se mettre à penser à partir de ces expériences sensorielles, émotionnelles, parce qu’il va se mettre à parler, parfois pour mentir. Le désir pulsionnel qui y est attaché suscite des angoisses parfois dramatiques chez l’enfant. Le mensonge était pour cette enfant une façon de se défendre contre cette menace face au fantasme coupable et à l’angoisse qui se tient entre le désir et l’interdit.

En complément de la théorie freudienne sur la sexualité infantile, je reprends une idée des travaux de Jean LAPLANCHE, pour ce qu’on pourrait en dire aujourd’hui de l’actualité.

L’enfant a à faire, face à cette sexualité à quelque chose qui n’est pas dans son montage biologique. Il n’a pas de réponse adaptative aux effets excitants qui se produisent dans sa relation à l’autre, dissymétrique. Il n’y a pas de montage biologique adaptatif à la relation à l’autre. Ces autres, les adultes arrivent avec leurs fantasmes inconscients, énigmatiques pour l’enfant dit-il, dans cette dissymétrie de la relation enfant-adulte.

Le corps maternel doit à la fois se proposer comme source de branchement sur le corps érogène de l’enfant, Eros qui est au service de la pulsion de vie mais évidemment, le sexuel présent chez l’adulte au contact de l’enfant doit être dominé, le sexuel maternel suffisamment refoulé (certaines mères n’arrivent pas à allaiter pour cette raison) et le sexuel de tous les adultes s’occupant d’enfants. Reconnaitre ce sexuel en eux, leur sexuel infantile, plus ou moins bien refoulé, pendant cette période de latence. On comprend la nature traumatique de la pulsion sexuelle aussi bien que celle du sexuel infantile réactivé chez l’adulte, ce corps psychique étranger irréductible dans la psyche avec lequel tout enfanta à faire avant même sa conception..

Question : aujourd’hui, n’y a-t-il pas une contradiction entre tout ce qui veut être reconnu du côté des abus, en même temps que les adultes semblent parfois oublier cette dissymétrie entre la psyche de l’enfant et celle de l’adulte ? Que deviendra chez l’enfant tout ce qui est rendu accessible à la vie conjugale des parents ou couples reformés ? Comment évoluent les structures familiales actuelles et les liens..

 

La psychanalyste qui a théorisé la première une psychanalyse de l’enfant en Angleterre est MELANIE KLEIN (1882-1960), psychanalyste d’origine autrichienne, arrivée à Londres en 1925.

Elle prend appui sur les travaux d’Hermine VON HUG-HELLMUTH et travaille avec d’autres analystes femmes, Paula HEIMANN, Joan RIVIERE entre autres qui font aussi des apports importants.

Plus royaliste que le roi, elle a repris la théorie oedipienne décrite chez Freud comme apparaissant vers trois ou quatre ans, mais en situant les fantasmes et angoisses oedipiens comme beaucoup plus précoces, dans leurs stades initiaux du tout premier développement de la vie psychique, dès six mois. Elle décrit la destructivité attachée à l’amour primitif, l’avidité, le fantasme de dévoration du sein maternel par exemple. On a pu s’indigner de ses descriptions d’un fantasme cannibalique, d’un sadisme oral dès la poussée des dents et le sevrage, d’une destructivité très précoce mais je pense qu’elle les a repérés la première. Elle décrit ce que Freud reprendra plus tard dans son œuvre, questionnant la haine, la pulsion de mort, le fait que l’humain peut trouver une certaine forme de plaisir « plus fort que lui » dans le déplaisir, dans la destructivité.

( Nous devons parler de conceptualisation qui n’est pas la réalité, mais une formulation « comme si ». Aucune science même la plus rationnelle ne peut prouver une vérité d’une façon définitive, indiscutable en lui donnant une traduction qui serait équivalente à sa réalité. La traduction même est déjà une déformation, que ce soit par nos organes des sens, par la technique utilisée, et en psychanalyse encore plus, par ce travail de nomination, d’interprétation de faits psychiques.)

M . Klein découvre donc les fantasmes précoces de la vie interne de l’enfant et invente un outil, la technique du jeu, dans ses cures d’enfants.

Elle découvre les mouvements complexes de la vie interne des jeunes enfants qu’elle soigne, et nomme une série de fantasmes et d’angoisses impressionnants dans leur terminologie, et souvent contestés mais à mon avis cliniquement précieux dans la nature archaïque de ce que nous pouvons retrouver dans des cures d’adultes ou dans les difficultés pour entrer en relation avec de jeunes enfants. Les fantasmes sont puissants et entrainent des angoisses terrifiantes. Leur violence suppose que l’adulte se présente comme une figure rassurante, permettant, acceptant la réparation chez l’enfant coupable. Un enfant de trois ans qui mord suppose que l’adulte puisse interpréter cet acte, non comme une intention consciente mais comme un moment d’attaque où le fantasme cannibale est lié à l’envie par exemple. Elle décrit l’envie et la haine projetée en l’autre comme des mouvements antérieurs à la jalousie, bien plus archaïques qu’il faut pouvoir imaginer, se représenter pour ne pas appliquer la loi du talion.

Elle a permis l’accès à une certaine représentation de la vie psychique primitive.

Même avant la parole, l’enfant associe autrement, par le jeu sur le même principe psychique de l’association libre par la parole, que l’analyste interprète et aide l’enfant à symboliser, donner du sens à ses fantasmes archaïques. Les fantasmes inconscients sont au cœur de la vie psychique.

Elle a pu apporter un regard nouveau sur la description d’enfants qui étaient diagnostiqués par une psychiatrie aliéniste comme déments, elle a analysé ces enfants en repérant ce qu’ils avaient fermé de leur appareil psychique par protection contre leurs angoisses primitives en les aidant à interpréter leurs angoisses indépassables qui auraient pu fixer la déficience intellectuelle. Entre autre elle décrit son traitement analytique auprès de Dick, enfant de quatre ans dont la pauvreté du vocabulaire et des acquisitions intellectuelles était au niveau d’un enfant de quinze à dix-huit mois, diagnostiqué dément précoce, chez qui elle découvre une inhibition du développement et non une régression, ce qui contredisait ce diagnostic.

Elle ne s’est pas directement occupée de questions éducatives dans son travail d’analyste, s’est maintenue fermement dans sa position analytique, sans pour autant nier les relations que l’enfant avait avec ses parents, dans cette structure oedipienne précoce, et elle rencontrait les parents. Mais, pas dans la même intervention que le théorisait Anna FREUD.

Cela me permet de dire à quel point une famille est un creuset où s’initient les premiers sentiments d’amour et de désir sexualisé autant que de haine envers le père et la mère, en incluant bien sûr la fratrie et les sentiments rivaux.

Dolto disait que l’école servait entre autre à éloigner l’enfant de ses parents et refroidir ces élans pulsionnels. Donc, il ne fallait pas que les parents aillent trop sur le terrain de l’école.

Question : comment aider un enfant à apaiser ses excitations pulsionnelles d’amour et de haine ? L’aider à contenir, refouler, sublimer, transformer ses pulsions d’amour et de haine trop excitantes et angoissantes et ne tenant pas assez compte de l’autre en tant qu’autre ? Le Professeur Corcos, pédopsychiatre parle de la dérive des contenants. Il parle de l’enseignement par le numérique sans compagnonnage, de parents fragilisés, vulnérables, déprimés par leur travail qui n’arrivent plus à contenir leurs enfants ou adolescents, des policiers qui répondent en miroir à l’agressivité des jeunes, la justice, la pédopsychiatrie, « il y a des trous partout ». Les enfants sont le miroir du désordre sociétal. Il suffit de contenants fermes pour les enfants ou adolescents transforment très vite leur pulsionnalité en mouvement civilisateur.

A la suite de M. KLEIN arrive DONALD WOODS WINNICOTT ( 1896-1971) d’abord pédiatre puis psychanalyste anglais , il s’en inspire, et donc de Freud duquel elle s’est inspirée. Sa formation de médecin a continué de l’influencer tout au long de sa pratique d’analyste. Il va consacrer ses recherches à la genèse du sujet dans son environnement, à partir de l’observation du nourrisson, « His Majesty the Baby » comme il dit. Et sera aussi au chevet des enfants inadaptés socialement, adolescents délinquants.

La découverte de Winnicott tient en une phrase qu’il affirme déjà vers 1940 : « CETTE CHOSE QU’ON APPELLE UN NOURRISSON N’EXISTE PAS ». Il rappelle ainsi que sans soins maternels il n’y a pas de nourrisson.

D’emblée, dans cette formule, on entend l’indissociable relation, intrication psychique entre le bébé et son environnement. Le terme relation indique bien que l’on n’est plus dans la théorie de Margaret MALHER d’une dyade mère- bébé de laquelle l’enfant peu à peu se séparer pour s’individuer. Il est d’emblée actif dans la relation, bien que totalement dépendant et non encore constitué en tant que un.

Il s’est souvent adressé aux parents, éducateurs, travailleurs sociaux pour leur rendre ce qui leur revient : leur singulière créativité.

« Un bébé ça n’existe pas » dit que le travail de Winnicott se base sur la relation entre le nourrisson totalement dépendant et donc vulnérable et sa mère, incluant le père. Nous ne sommes plus dans la conception de la dyade et du processus de séparation-individuation tels que Margaret Malher les a théorisés. D’emblée, le nourrisson est dans un lien très intense avec son premier environnement.

Dans la continuité de Freud il n’ignore pas la dimension pulsionnelle mais il découvre par sa double formation un pan nouveau sur ce qui permet qu’un enfant devienne une personne, se mette à exister, ait un sentiment d’intimité en même temps qu’une capacité à entrer en relation avec le monde. Il faut d’abord qu’il y ait un lieu dans la pensée de l’autre pour commencer de se sentir exister. C’est une certaine qualité de disponibilité psychique de la mère. .. Ce qui nourrit le sentiment d’existence est donc lié à un sentiment continu et profond de sécurité apporté par les soins maternels et une présence fiable. Ce qu’il appelle « la préoccupation maternelle primaire » fait allusion à un état psychique particulier. C’est la mère qui lui présente le monde. Elle doit être « suffisamment bonne », c’est-à-dire juste ce qu’il faut, pour ne pas être toute-puissante et grâce à sa désadaptation progressive, à ses faillites, permettre à   l’enfant de trouver en lui ses propres forces psychiques et entrer ainsi en contact avec la réalité extérieure qui ne coïncide pas avec sa réalité interne. Il ne faut pas en faire une conduite normative ni rassurer la mère si celle-ci parle de son agressivité, voire de ses fantasmes infanticides..

LE VRAI SELF ET LE SELF FALSIFIE OU FAUX-SELF : il est impossible pour un enfant d’entrer en relation avec lui-même s’il doit réagir trop souvent à son environnement, s’adapter sans que l’environnement s’adapte à ses besoins psychiques, à ses rythmes naturels, à sa spontanéité, lieu du sentiment d’existence et de créativité. Un faux-self se construit en réaction à une carence précoce de l’environnement, au moment de la dépendance absolue. C’est une soumission qui a des degrés plus ou moins graves. Ces nourrissons deviennent des individus qui , à la place des intérêts culturels, » présentent une agitation extrême, une inaptitude à se concentrer, un besoin de s’exposer à des heurts provenant de la réalité extérieure, si bien que l’existence de l’individu peut être remplie par des réactions à ces heurts ». Winnicott peut aussi l’appeler self de défense ou de protection en tant qu’il vient former une organisation psychique qui vient au contact de la réalité extérieure et « fonctionne » parfaitement bien, dans un semblant d’adaptation mais protège en réalité, sur un mode d’auto nursing le vrai-self, source des impulsions personnelles.

Winnicott s’est donc beaucoup adressé aux parents, éducateurs, médecins, et développé son point de vue sur l’éducation des enfants.

Pour lui, l’éducation morale ne doit pas se substituer à l’amour. Et il y a toujours plus à gagner par l’amour que par l’éducation. Ici, l’amour est l’ensemble des soins naturels donnés au nourrisson et à l’enfant qui favorisent les processus de maturation et aident notamment l’enfant à intégrer ses mouvements agressifs puissants liés aux sentiments d’amour. Intégrer le fait que la mère aimée puisse être aussi la mère détestée parce que frustrante, qu’une part de la réalité de cette mère échappe à son fantasme tout-puissant de la posséder exclusivement comme une partie indistincte de lui est un grand progrès pour la croissance psychique qui consiste à apaiser la destructivité face à la libido, à Eros. Et c’est un grand travail psychique qu’il faut soutenir chez l’enfant pour qu’il puisse intégrer l’ambivalence affective et la culpabilité inhérente, passer de cette culpabilité à un sentiment de responsabilité, intégrer ses excitations par ses pulsions réparatrices. Chez l’adolescent, rendre service a plus de valeur que l’enseignement de règles morales.

Comme Freud le disait, l’éducation qui implique des sanctions et l’implantation de valeurs parentales ou sociales sans tenir compte de la maturation psychique de l’enfant est une erreur. WINNICOTT : « L’apprentissage de l’arithmétique suppose par exemple que l’enfant ait intégré le concept d’unité et l’idée du pronom personnel de la première personne. L’enfant qui connait le sentiment le sentiment croissant de l’expression « Je suis » et qui peut l’assumer, connait le chiffre « un » et désire tout de suite qu’on lui apprenne l’addition, la soustraction et la multiplication ». Il faudrait parler ici du stade du miroir tel que Lacan l’a réinventé à partir d’Henri Wallon.

« L’éducation morale suit naturellement l’apparition de la moralité chez l’enfant, conséquence des processus de développements naturels que favorisent de bons soins ». Aider l’enfant à devenir ce qu’il est.

Pour le nourrisson, ce qui n’est pas moral c’est d’avoir à obéir aux dépens de son mode de vie personnel. (Situations d’empiètement). Par exemple, « un enfant, à n’importe quel âge, peut éprouver le sentiment que manger est mal, jusqu’au point de mourir pour le principe. L’obéissance amène des récompenses immédiates et les adultes ne prennent que trop facilement l’obéissance pour signe de croissance ». Le « vrai self » est privé d’expérience vivante, les processus spontanés de maturation ne pouvant s’exprimer et un « faux-self » se met en place.

Cette perspective d’éducation indissociable des soins psychiques que garantit l’environnement suppose une présence et une attention soutenues de cet environnement. Par exemple repérer si un enfant ne joue pas plutôt que de savoir si ses comportements sont dans la norme des échelles et grilles.

Question quant aux rythmes de l’enfant. Qui s’adapte de l’enfant ou de son environnement ? L’enfant en maternelle doit très tôt entrer dans les apprentissages. La période de latence autrefois vers sept ou huit ans se réduit, l’enfant étant exposé à des messages traumatiques, empiétants par rapport à son immaturité, la vie conjugale des parents n’a parfois plus de secret, cet enfant lui-même a-t-il le droit fondamental à son espace intime ? L’intime-intimité, le droit de ne pas communiquer.

Autre question : a singularité de chaque enfant dans les rythmes de sa croissance psychique et somatique n’est pas réductible à un ensemble de comportements. Sur quoi portons-nous notre attention aujourd’hui ? La référence du comportementalisme pour l’éducation des enfants (les chocs électriques dans les couches par exemple), les idéologies, recettes des conduites prennent le pas sur la pensée de la complexité humaine.

Tout ce qui empiète sa vie psychique naissante créé une discontinuité d’existence et engendre cette adaptation excessive . Un empiètement peut être une discontinuité dans la présence-absence psychique aux besoins de son nourrisson, une réaction violente répétée face à un geste agressif spontané interprété comme une intention du nourrisson. Si la mère répond aux coups de pieds que son nourrisson lui donne pendant qu’elle le change par un mouvement de colère en lui prêtant l’intention de lui faire mal, ce sera très différent d’une réponse dans laquelle la mère interprètera ce mouvement comme une gesticulation spontanée et qu’elle en fera un jeu.

Winnicott est donc un penseur des traumatismes précoces. Plus tard, cela supposera que le patient qui a été l’un de ces enfants trahis retrouve la capacité à faire confiance, en trouvant cette sécurité auprès de l’analyste et de la situation analytique.

Les trouvailles de Winnicott ont souvent été détournées : l’objet transitionnel par exemple, qu’on appelle familièrement le doudou : il est parfois devenu un objet familial sacré, fétiche qu’il ne faut surtout pas perdre, jusqu’à empêcher l’enfant de s’en détacher lorsqu’il est temps.

DANS SA THEORIE DE L’ESPACE ET DES OBJETS TRANSITIONNELS, Winnicott découvre aussi la vitalité de la créativité humaine. Il prolonge le travail de Freud sur la pulsion en centrant son intérêt sur les conditions permettant à l’expérience pulsionnelle d’être enrichissante et créative.

L’expérience pulsionnelle première de la tétée est sans différenciation encore entre la bouche et le sein. Quand tout se passe bien, que la mère s’adapte parfaitement, avec au début une disponibilité totale au besoin du nourrisson, celui a l’illusion qu’il a créé ce sein ; il est parfaitement là où il était désiré, comme si le nourrisson l’avait créé. C’est le trouvé-créé. Puis les premières frustrations le désillusionnent et la réalité extérieure apparait. La réponse maternelle n’est plus adaptée à cent pour cent. L’objet n’est pas créé par l’omnipotence de l’enfant, il sort de cet illusionnement mais en même temps, l’enfant a encore besoin d’en avoir une possession intermédiaire, moi-non moi. Le désir de l’enfant n’est pas tout-puissant. L’espace transitionnel est exactement cet espace intermédiaire entre réalité interne et réalité externe, la première possession non-moi du sujet, essentiel pour que l’enfant instaure une relation avec le monde. C’est dans cet espace que vont peu à peu se loger le jeu, l’activité de penser, la religion, l’art,les expériences culturelles. et L’objet transitionnel, qui n’est pas forcément une peluche, ce peut être un rayon de soleil, une partie d’un tissu etc. est un objet entre le moi et le non-moi. Il n’y a pas à décider. Pensée du paradoxe. C’est une zone où il n’y a pas que de l’excitation pulsionnelle omnipotente fermée sur elle-même, pas non plus uniquement une adaptation excessive à la réalité extérieure frustrante, contrôlante et empiétante. C’est une zone de repos, zone neutre, tranquille essentielle pour jouer, rêver et créer, même si le jeu lui-même comporte de l’agressivité. Il faut que l’excitation dont on a vu qu’elle était souvent source d’angoisse puisse rester dans un cadre un peu neutralisant, pour ne pas dépasser un certain seuil et que vivre soit une expérience de plaisir à être dans le monde autant que de créer ce monde. On entend ici que pour créer, jouer, il faut être dans un état de repos, d’informe dira Winnicott, de non intégration, ce qui suppose d’avoir fait précocement l’expérience d’un sentiment de confiance absolue en l’environnement premier, la mère-environnement. Le travail du psychanalyste avec l’enfant c’est de donner en retour ce que l’enfant apporte, comme la confiance, quelque chose qui appartient à l’enfant.

«  Quand un patient n’est pas capable de jouer, le thérapeute doit se préoccuper de ce symptôme majeur avant d’interpréter des fragments de comportement ».

Il différencie « the game », jeu avec des règles et un objectif de victoire de « the play », jeu sans règles, ou bien l’enfant peut en avoir à lui mais on ne les perçoit pas. Ce jeu est libre, créatif.

Winnicott parle dans cette temporalité du ing, le playing que nous n’avons pas dans la langue française, c’est-à-dire, en train de se dérouler, non pas une action arrêtée mais en devenir.

Question : les enfants ont-ils encore des aires de repos psychique pour créer leur réalité intermédiaire, entre dedans et dehors ? Quelles formes de créativité leur propose t-on aujourd’hui ? Les images des écrans sont-elles des aires transitionnelles ? Apaisent-elles ou excitent-elles ou bien les deux dans un double-lien ?

L’illusion n’est-elle pas aujourd’hui prolongée trop longtemps ? Quelle est cette réalité d’aujourd’hui, entre imaginaire et tentations, illusions de l’impossible, tant cette réalité est aujourd’hui insécurisante? Il semble que beaucoup de discours et attitudes des adultes proposent des contradictions aliénantes pour les enfants. La réalité extérieure, celle qui fait sortir l’enfant de son fantasme d’omnipotence est décrite comme difficile. On entend que l’avenir n’est pas sûr, que les adultes ne peuvent faire à leurs enfant la promesse de leur offrir un monde meilleur que le leur, en même temps qu’on leur demande de plus en plus tôt d’être adaptés dans leurs comportements, seuls devant des images qui sont traumatiques, désillusionnés très tôt sur la poésie du monde.

Winnicott a apporté beaucoup en conceptualisant cet espace intermédiaire.

En lien à cela, c’est toute la capacité de LA PENSEE DU PARADOXE qu’il a dégagée comme processus essentiel de la construction humaine, comme concept et pas seulement comme tournure d’esprit.

La pensée du paradoxe n’est pas celle de la contradiction bien que nécessaire, ni celle de la double injonction qui est une emprise sur l’autre ( faire tenir ensemble deux propositions inconciliables sans solution autre que la violence ou la folie).

Le paradoxe produit du sens. Il n’a pas à être résolu parce qu’il est un moment de croissance, et ce n’est pas une situation binaire.

Deux situations où il est fondateur d’un moment essentiel pour l’enfant, où se déroule une transition :

  • Cette aire transitionnelle et tous ses phénomènes entre la réalité du dedans et celle du dehors., ni l’une ni l’autre.
  • Cet espace transitionnel est un espace potentiel, dans lequel commence à se symboliser l’absence de la mère, ou plutôt ses mouvements de présence /absence, de perte et de retrouvaille.

L’objet se situe entre, ce qui suppose un espace, ni totalement à soi ni totalement extérieur. C’est d’espace dont il s’agit ; un espace entre le dedans et le dehors, en même temps que se construit un espace en soi où l’autre peut avoir une autre présence que physique.

  • La capacité à être seul en présence de la mère, période où l’enfant peut rester jouer seul, avec la présence de sa mère dans la même pièce, qui fait autre chose. C’est le processus en cours l’internalisation d’une instance maternelle sécurisante qui permettra de plus en plus à l’enfant de rester seul dans une pièce et s’occuper seul.

La pensée de Françoise DOLTO (1908-1988) rejoint cette conception winnicottienne d’une transmission de valeurs issues du système social local des parents plus que d’une éducation morale, sorte de dressage. Ces valeurs sont nécessaires face à la brutalité des mouvements pulsionnels du nourrisson. Dans un moment d’excitation il peut mordre ; les valeurs morales humanisent ce qui n’est pas encore tout à fait humain pour l’enfant. Par projection, l’objet mordu deviendra un objet qui mord. Ces peurs brutes s’humanisent au travers des expériences de l’enfant, par rapport à ses parents en colère mais qui ne mordent pas en représailles, c’est-à-dire, n’actualisent pas ce qui correspond chez l’enfant à sa pulsion ou à son fantasme .

Françoise Dolto a été l’élève de Sophie MORGENSTERN (1875-1940), pionnière de la psychanalyse d’enfants en France qui va théoriser l’utilisation du dessin dans son travail avec les enfants)

Elle dit que le bébé est d’emblée un sujet, c’est-à-dire une personne humaine à part entière orientée vers une maturation qu’il ne faut ni entraver ni pervertir.

C’est un sujet parce que dès sa conception, inscrit dans une filiation, un ordre des générations, et à sa naissance dans son sexe. Qu’il est un être singulier dans un groupe d’appartenance avec ses vivants et ses morts, porté par la parole, les non-dits ou les mensonges, et les désirs énigmatiques de quelques autres. Sujet parce qu’être de langage qu’il soit corporel ou verbal.

       Elle redécouvre à sa façon et après Jacques LACAN ( 1901-1981) que « tout est langage ». Le corps et la parole, le corps pris dans la parole, dans celle de l’autre au début, dans les messages conscients et surtout inconscients de l’autre.

Elle invente le concept d’image inconsciente du corps pour la différencier du schéma corporel renvoyant au corps en tant que masse dans l’espace et le temps. Et les deux ne coïncident pas.  On écoute un enfant parler, il dessine en même temps. Son dessin dira autre chose que ce qu’il dit. Il est un équivalent du rêve.

Cette image inconsciente du corps c’est de la naissance à ses trois ans, juste avent l’Œdipe, la matrice de ses relations affectives et érotiques à l’autre, le premier langage marqué par la façon dont l’adulte lui parle, s’occupe de lui, occupe sa place de père ou mère, avec ce qui de ses désirs ou angoisses infantiles refoulés vient plus ou moins fortement mettre l’enfant à une place déviée, l’empêchant d’advenir en tant que sujet.

Exemple issu de l’expérience d’une intervenante d’une Maison Verte, cité par Claude Schauder.

Marie qui a 18 mois ou deux ans, arrive avec son père et dessine sur un tableau en débordant sur le mur. Annie, l’accueillante présente ce jour-là est occupée au téléphone. Marie la regarde, Annie la gronde et Marie recommence. Annie lui dit qu’elle est en train d’essayer de lui raconter quelque chose en griffonnant sur le mur. Elles vont vers le père, caché derrière « le Monde ». Marie s’adresse à lui et lui parle de ce débordement sur le mur, comme d’un message qu’elle essaie d’entendre et lui demande de l’aider. Il lui répond : « vous voyez bien, elle fait n’importe quoi, elle griffonne ». Marie la regarde puis se met à griffonner sur le pantalon de son père qui a un mouvement à la fois violent, surpris et fâché. Puis il dit « vous savez, à cet âge- là… » . marie commente doucement : « Papa pas non ». Le père, comme Annie, intercepte alors dans les yeux de sa fille un regard de désespoir immense et murmure « Mon père, vous savez, c’était les coups de ceinture ! » avant de s’effondrer en larmes. Ce père va pouvoir entrer dans la parole, la parole vraie dit Dolto, et peut prendre sa place de père. On voit aussi comment l’enfant crée des résistances chez le parent dans ses résonnances infantiles douloureuses.

Moustapha SAFOUAN évoque le souvenir d’un enfant qui se trouvait, le premier jour où on l’a mis à l’école, mélangé à une quantité d’autres enfants tous mis en rang les uns à côté des autres. En face, se trouvait l’institutrice en train d’écrire. Voulant sans doute créer un lien d’amitié avec cette personne étrangère, il est allé jusqu’à elle en lui demandant « comment tu t’appelles ? » Absorbée dans son écriture, elle lui répond « reviens à ta place ». L’enfant y est revenu mais ne savait sans doute plus si elle lui avait demandé de regagner sa place ou bien si elle s’appelait « Madame reviens-à-ta-place ». Dans ce doute il a fait pipi dans sa culotte. Voilà comment l’intégrité corporelle peut être mise en danger dans un moment de tentative de socialisation, avec une réponse inadéquate de l’adulte, et comment l’enfant essaie de retrouver un lien avec son corps libidinal, « d’en appeler à son organe promis à être génital, bien que réduit pour un temps à faire pipi ».

Alors il faut parler là où quelque chose a manqué du côté de la symbolisation, c’est-à dire ce qui ne peut passer que par la signification de la parole.

Humaniser c’est faire advenir à la parole. On parle avec le risque des malentendus, ou pire de l’aliénation à ce que l’autre va faire de notre dire, ou va nous faire dire. Cet enfant, était déjà en marche dans sa socialisation, essayait d’être un parmi les autres. Un certain sadisme éducatif de l’adulte l’a destitué de son être parlant. Pour parler, l’enfant doit avoir quitté la position toute-puissante de « His majesty the Baby », ce qui est difficile mais cet enfant en était pourtant déjà là.

DOLTO reprend le travail de Lacan sur l’accès au symbolique, ce qui ne peut advenir que par l’acceptation de la perte, on parle parce que ça manque, on parle en acceptant l’écart avec l’innommable, ce qui est perdu à jamais de notre vécu, on parle avec le risque des malentendus.

LACAN a non pas découvert mais inventé une catégorie de la vie psychique qu’il a appelée le Réel, qu’il a tout de même dû nommer. Comme quoi il est difficile de faire autrement que de parler.

Ce que DOLTO découvre c’est que toutes les séparations, pertes qu’elle nomme castrations symboligènes produisent du symbolique parce qu’il faut renoncer à des satisfactions pulsionnelles pour accéder à de nouvelles expériences qui éloignent peu à peu du corps maternel et apportent autre chose. Mais ces privations sont douloureuses et elles doivent être parlées sinon c’est du dressage.

Les privations définitives d’un mode de satisfaction de telle ou telle pulsion sont réussies si elles portent des fruits, dans le fait d’apporter d’autres satisfactions plus symboliques, c’est-à-dire faisant entrer l’enfant dans le langage parlé.. C’est un gain pour lui. La castration orale c’est quitter le sein de sa mère pour recevoir encore meilleur que le lait, se mettre à échanger autrement avec elle. La castration anale, c’est ne pas nuire à un corps, au corps de l’autre, aux objets qui sont le bien de l’autre, à son propre corps en tant que bien du sujet que l’enfant est. On voit que ça humanise et ça fait entrer dans un échange autre, une communication dans le langage parlé, si c’est ainsi que la mère et le père se sont adressés à cet enfant.

LE DESIR ET LE BESOIN. Le désir demande à être entendu, le besoin à être satisfait.

Exemple :L’enfant qui fait une colère devant une vitrine où se trouve un beau camion de pompier que la mère ne peut pas lui acheter doit être reconnu dans la douleur qu’il vit de ce manque. « Je comprends à quel point ce camion te fait envie, il est si beau » et cela suffit à éteindre la colère et l’angoisse. Les demandes ont à être parlées et pas toujours satisfaites. L’essentiel est que l’enfant soit toujours soutenu par des mots. La demande est toujours une demande d’amour dit Dolto. Ca engage l’adulte autrement que frustrer ou faire plaisir sans limite pour se débarrasser de la demande. Ca suppose de parler, parce que c’est la meilleure réponse face à la demande d’amour.

Elle évoque un autre exemple de ce que peut se passer dans une Maison Verte, qu’elle décrit comme un jardin public couvert. Un enfant de 6 mois qui marche à quatre pattes, un peu déluré, veut monter sur l’échelle à quatre barreaux sur laquelle montent des enfants de deux à trois ans. Il ne faut pas l’en empêcher d’y aller. Il veut aller vers le danger, les plus grands peuvent lui marcher sur la tête. Il faut veiller au grain, dit-elle, être vers lui « tu voudrais faire comme les autres et tu n’y arrives pas ». Lui dire qu’il y arrivera un jour, que c’est très bien d’essayer. Elle veut parler ici des mères qui par anxiété aident l’enfant comme s’il avait réussi à grimper. Cette illusion de réussite créé le sentiment d’appartenir au corps d’un autre et est préjudiciable pour l’ enfant rendu craintif et phobique. A contrario, si l’adulte interdit quelque chose que l’enfant transgresse et que celui-ci réussit sans dommage, ça prouve que l’interdit n’était plus d’usage. L’adulte qui persiste dans l’interdit ne sait pas ce qu’il fait et l’enfant ne sait pas ce qui lui arrive. Cela ramène à Winnicott et cet accompagnement de l’enfant au plus près de ce qu’il est capable d’expérimenter en harmonie avec le stade de maturation de la psyche aussi bien que du corps somatique où il en est, comme par exemple l’apprentissage de la propreté. La continence sphinctérienne par ne s’éduque pas dit Dolto. C’est un phénomène normal. Si l’enfant est éduqué

avant la terminaison nerveuse physiologique, on dresse l’enfant à l’inhibition des émonctoires, au moment où l’enfant a besoin de faire. Etre attentif aux étapes de maturation propres à l’enfant, non par angoisse ou répétition de ce qu’a été l’éducation reçue par les adultes par exemple, Winnicott nomme ce processus dynamique « GOING ON BEING », Dolto le nomme « L’ALLANT-DEVENANT ». Il ne faut pas devancer l’enfant ni le retenir dans une position régressive, comme le bercement, les surnoms..). Ni entraver, ni pervertir.

Le désir est indestructible et en grande partie inconscient. Freud l’a dit. C’est l’exemple de cette enfant qui avait volé de l’argent en lien avec son sentiment amoureux envers son père. Ce que nous avons refoulé de nos désirs infantiles reste indestructible. Mais il peut être repéré, reconnu, analysé et parlé. Il est lié à cette vie pulsionnelle dont j’ai parlé et aussi d’ailleurs à l’inconscient de ceux qui ont porté l’enfant dans la vie.

Le besoin lui, est organique et doit être satisfait. Comme être nourri ou être sécurisé.

La perversion des parents ou éducateurs dit encore Dolto c’est de prendre les besoins pour les désirs et les désirs pour des besoins.

Dans sa position politique, elle pensait cependant que « certaines difficultés de la condition de l’humain sont inhérentes à son essence et ne sauraient céder à aucune tentative de réforme ». Ce qui soutient c’est d’être au plus près de la nature humaine et de la subjectivité propre à chaque enfant qu’elle soutient plutôt que des projets adaptatifs ou rééducatifs, de dépistages systématiques susceptibles de repérer des sujets ou familles « à risque », contrôles fondés sur une transformation des comportements supposés pathogènes et les éradiquer.

La position du psychanalyste n’est pas d’adapter ou de dire aux parents , éducateurs, médecins comment éduquer l’enfant à être bon à l’école ou gentil avec ses parents.

Avec Dolto, dans l’après-guerre, plusieurs analystes femmes vont apporter leurs contributions à la psychanalyse des enfants : Jenny AUBRY ( pionnière des recherches sur les enfants carencés en soins maternels), Maud MANNONI (qui a fondé l’école de Bonneuil pour enfants autistes et psychotiques), Ginette RAIMBAULT ( psychanalyste à l’hôpital auprès des enfants atteints de maladies graves) ; Dolto a sans doute été celle qui a eu le rôle le plus important dans la société en transmettant aux parents, juges, éducateurs, maternités, ce qu’elle avait appris des enfants une certaine idée de la parole vraie auprès d’eux. Winnicott en Angleterre parlait aussi à la BBC.

Et dans les années 75/80, s’ouvrent les nombreux dispensaires pour enfants, de consultations médico-psychologiques, avec des psychiatres en formation et en psychanalyse personnelle.

Quelles sont les angoisses actuelles des parents ? Le guide du bon parent, de la bonne éducation, comme les guides pour être heureux sont nombreux. Mais il faut s’interroger sur ce que l’enfant peut représenter comme idéal qui viendrait redonner sens à une vie dont nos patients adultes nous parlent. La question du sens va se poser de plus en plus pour l’humain disait LACAN en 1966.

Le sens c’est ce qui intéresse la psychanalyse. Mais elle ne l’atteint jamais au point de la résoudre. Elle interprète par hypothèses. En même temps, ce qu’il appelle le Réel, qui n’est pas la réalité, est précisément ce qui rate, ce qui ne marche pas, ce qui fait symptôme.

 

On pourrait souhaiter que la façon de traiter les enfants aujourd’hui, de les aider à grandir ne les mette pas à la place d’un symptôme de l’humanité. Viennent-ils servir d’idéal, de complément narcissique auquel on ne refuse rien sauf la parole, d’objet d’excitation indifférenciée comme lorsque père et enfant partagent le même écran, ou mère séparée, esseulée partageant le même lit que son enfant? Dolto disait que les enfants doivent toujours être maintenus à la périphérie du couple conjugal.

La parole est ce qui fait vivre, ce qui décolle du corps de l’autre, et de l’angoisse du parent, (voir l’exemple de la veilleuse), ce qui doit être entendu sans y répondre systématiquement par l’objet qui comblerait illusoirement le manque. Et elle demande du temps..

Anne Delafosse-Bazin, 08 janvier 2024